Afin d'évoquer avec plus de poésie mon approche esthétique et mon cheminement intérieur, je laisse la parole à Dominique Fernandez, dans ces extraits du texte de présentation d’Itinerrances, paru en écho de l’exposition à la Maison Européenne de la Photographie.
Né en Algérie d'un père sicilien et d'une mère sarde, fils de la Méditerranée, Ferrante Ferranti s'est voué très tôt au double mystère du soleil et de la pierre. Comment trouver un langage qui relie la lumière et l'ombre, la volupté du Sud et la rigueur du regard, le monument et sa ruine? De grands aînés l'ont aidé dans sa quête: l'architecte Fernand Pouillon, les photographes Lucien Hervé et Herbert List, le cinéaste Andreï Tarkovski. Après cette école de discipline, ce fut la découverte du baroque, à travers surtout l'Italie et son exubérance heureuse, le Bernin et la sensualité de ses marbres plus vivants et troublants que la chair. Piranèse, enfin, et la sauvage poésie de sa vision ont affermi son art et terminé sa première éducation.
Puis ce fut le début des voyages, le temps des dérives enchantées, l'exploration de l'Europe de l'est, du proche et moins proche Orient, de l'Amérique latine, les rencontres insolites, les moments de grâce surpris à l'improviste, un enfant avec son cerf-volant sous la pluie, un cheval errant dans les décombres de son village détruit, la caresse d'un rayon de soleil dans la pénombre d'une église, un militaire endormi dans le transsibérien.
Tout ce théâtre de la beauté et de l'éphémère devait l'amener sur les chemins du sacré. Il les a parcourus sur le mont Athos, en suivant les processions de la Semaine Sainte à Séville et dans le Nouveau Monde, en visitant les lieux de pèlerinage, en explorant les souterrains de temples enfouis, en gravissant dans la montagne les marches de sanctuaires, en étendant sa curiosité et sa ferveur partout où se déroulent les cérémonies qui unissent l'Inde, le Brésil, l'Ethiopie, Bali, Ispahan ou Jérusalem dans une même fête émerveillée de l'œil et de l'esprit.
Dominique Fernandez